Charlemagne s’empressa, dès la prise de Barcelone, de réorganiser politiquement l’ensemble des territoires pyrénéens qui constituaient désormais une protection essentielle de l’Empire carolingien contre les remuants voisins sarrasins. Ce fut la création de la Marche d’Espagne, composée de quinze comtés dépendants des monarques carolingiens, qui en nommaient les comtes. Huit d’entre eux concernaient les terres catalanes : Urgell, Cerdagne, Roussillon, Ampurias, Besalu, Ausona, Gerona et Barcelona. Auxquels il convient d’ajouter les trois “vicomtés” (nom impropre, mais employé par commodité) du Conflent, du Vallespir et de Peralada, plus ou moins inféodés aux comtés. Pour les diriger, Charlemagne et ses successeurs directs (Louis le Pieux de 814 à 840, puis Charles le Chauve de 840 à 877) puisèrent dans la seule “aristocratie” dont ils pouvaient disposer : celle des petits “seigneurs” locaux, tous Goths, qui étaient restés dans les vallées reculées, abrités des turbulences historiques et dans lesquelles ils jouissaient d’une incontestable autorité. Encore convenait-il aussi de repeupler la région, ce que le pouvoir carolingien sut faire en y accueillant tous ceux, Goths ou autres, qui quittaient le reste de la péninsule ibérique, restée sous domination sarrasine. Le système des aprisions, terres en friche données en bénéfice avec prescription trentenaire, sous réserve de les mettre en valeur par le défrichage et l’exploitation, attira les immigrants aussi sûrement que le souhait de rester dans un environnement chrétien.