En entreprenant des randonnées le long de cette ligne de frontière, vous remontez le temps de quelques siècles dans un espace qui n’a guère changé, et pourtant les roches qui portent vos pas nous racontent un passé très lointain, très tumultueux d’une frontière entre l’Ibérie et l’Europe.
Nous remonterons à la fin de l’ère primaire, il y a environ -252 Ma (Ma signifie million d’années), un continent unique forme le monde terrestre. Un énorme massif montagneux occupe notre région, allant du Portugal aux Vosges et se prolongeant jusqu’au Appalaches. C’est la chaîne Varisque ou hercynienne, très haute, l’érosion va peu à peu la démanteler donnant de puissantes séries rouges d’argiles, grès et conglomérats.
Au cours de l’ère secondaire cet immense continent se fracture et cela nous concerne. En effet, vers -180Ma au Jurassique l’océan Nord Atlantique commence à s’ouvrir et son accrétion dure encore. Cette séparation du continent Nord-Américain de l’Eurasie va s’accompagner 50Ma plus tard par l’ouverture du golfe de Gascogne : l’Afrique et l’Ibérie sont solidaires et dérivent par un mouvement de rotation sénestre (vers l’est en supposant l’Europe fixe) à raison de 3cm par an jusqu’à -85Ma ; ce golfe ouvert sur l’Atlantique s’étend tout le long de ce qui constitue la chaîne actuelle des Pyrénées créant par distension des bassins de sédimentation où se déposent surtout des calcaires. Donc une première frontière naturelle, un bras de mer séparait l’Espagne de la France. Si le déplacement vers le Sud de l’Ibérie n’avait pas cessé un océan nous séparerait de l’Espagne.
Au Crétacé supérieur, il y a – 85Ma, l’Afrique bloque le mouvement et commence à dériver vers le Nord, provoquant par des mouvements de compression en trois phases la fermeture de ce bras de mer. Le phénomène commence dans la partie orientale et finit au Pays Basque. On a ainsi une collision de deux masses continentales l’Ibérie et l’Eurasie qui donne la Chaîne Pyrénéenne qui est en place il y a-37Ma. Une nouvelle frontière naturelle est née. Cette collision a provoqué une subduction de l‘Ibérie sous l’Eurasie et un raccourcissement de la croûte continentale d’environ 70km qui se traduit par des chevauchements, des plis et des failles. Notamment la faille Nord pyrénéenne qui d’est en ouest parcourt toute la chaîne proche de la frontière que nous étudions.
Cette collision est responsable des affleurements actuels de roches qui se sont formées en profondeur : -les granites générés au cours de l’orogénèse Varisque il y a environ -280Ma par fusion à quelques dizaines de km de profondeur ; – les roches sédimentaires comme les calcaires formés lors de la dérive de l’Ibérie dans des bassins marins se sont trouvés portés à quelques km de profondeur ; toutes ces roches remontées en surfaces sont alors soumises à l’érosion et cela depuis plus de 30Ma. Au fur et à mesure de l’emplacement des bornes, il vous sera indiqué leur nature.
JP P
